mardi 22 avril 2014

Philip Roth La bête qui meurt


Présentation de l'auteur
Philip Roth est né en 1933 et a longtemps vécu à Newark, dans le New-Jersey aux Etats-Unis et il vit actuellement dans le Connecticut. Son premier roman, Goodbye Columbus (Folio n° 1185) lui vaut le National Book Award en 1960. Il a ensuite reçu de nombreux prix aux Etats-Unis : en 1987 pour La contrevie (Folio n° 4382), en 1992 pour Patrimoine (Folio n° 2653) et en 1995 pour Le Théâtre de Sabbath (Folio n° 3072).
Pastorale américaine (Folio n° 3533) a reçu le prix du Meilleur Livre étranger en 2000 et La Tache le prix Médicis étranger en 2002.


« L'histoire d'une vie s'inscrit dans le corps tout autant que dans le cerveau. »
Citation d’Edna O'Brien que Philip Roth a placée en épigraphe

Ce titre "La bête qui meurt", comme il l'écrit lui-même page 93, est tiré d'un vers du poète anglais Yeats :
« Consume mon coeur; malade de désir / Et attaché  à une bête qui meurt / Il ne sait ce qui lui arrive ».

Consuela Castillo, une étudiante comme une autre, pense d’abord le docte professeur David Kepesh, une étudiante particulièrement attirante comme il en a connue un certain nombre depuis bien longtemps, depuis toutes ces années qu’il enseigne à l’université.  Derrière son visage avenant de professeur émérite à la culture étendue, derrière l’homme reconnu qui écrit, joue du piano, s’adonne à la critique culturelle, se profile « la bête » attirée par la gente féminine, surtout la jeunesse qui fréquente ses cours.

David Kepesh, sous un masque affable, derrière une façade de culture raffinée, cet homme de 62 ans à l’époque de la rencontre avec Consuela, qui possède sa petite renommée locale, pianiste amateur, cache son goût immodéré pour les filles affriolantes qui suivent ses cours, courtisées en douceur après les soirées de fin d'année qu’il affectionne. Au-delà de la prédilection de l’auteur pour décortiquer les relations entre hommes et femmes, c’est sa volonté de mettre à nu les certitudes,  les travers de la société américaine qui domine, analyse toujours aussi fine à travers les fragilités de ses personnages. On retrouve dans ce roman la même vaine que dans d’autres romans  comme La Contrevie publié en 1986 ou les aventures précédentes du professeur David Kepesh que Philip Roth avait déjà conté dans Le sein et dans Professeur de désir

Si David Kepesh semble maîtriser sa vie, butinant d’étudiante en étudiante au fil de ses années d’enseignant, il n’a pas oublié Consuela, il y a déjà huit longues années, expérience qui lui a laissé un goût amer et des regrets. Lui qui était resté le maître de ses pratiques et de ses sentiments, le mâle dominant de toutes ces relations, découvre avec Consuela ce qui n’arrive qu’aux autres, des sentiments inconnus comme la jalousie et la dépendance, la difficulté de décider ou la peur de vieillir.
David Kepesh rappelle un autre héros de l’auteur, le Nathan Zuckerman de sa grande fresque en neuf volumes, un écrivain qui dévoile ses secrets de famille sans vergogne, un Philip Roth toujours à la recherche de cet « élan vital » de la pâte humaine, des méandres du désir dont il voudrait bien cerner le mystère. Cette beauté cubaine de 24 ans, aux seins si fascinants, est l’occasion d’une réflexion sur la solitude, la liberté ou la libération sexuelle des années 60.  

L’amour et la mort ou plutôt selon Philip Roth, le sexe qui contrebalance la mort, la danse de mort interfère dans cette liaison transgressive avec Consuela, qu’il voit comme seul remède pour supporter toutes les petites et grandes avanies de l’existence, «  ce n'est pas le sexe qui corrompt l'homme, c'est tout le reste… C'est aussi une revanche sur la mort. Ne l'oublie pas, la mort. Ne l'oublie jamais. »
 File:Amedeo Modigliani 008.jpg
Consuela enverra à Kepesh une carte postale représentant Le grand nu de Modigliani


 Citations de Philip Roth
* « La farce que la biologie joue aux humains, c’est qu’ils sont intimes avant de savoir quoi que ce soit l’un de l’autre ».
* « Dans une culture comme la mienne, où rien n’est censuré, mais où les médias nous inondent de falsifications imbéciles, la littérature sérieuse n’est pas moins une bouée de sauvetage ». Philip Roth "Parlons travail" (édition Gallimard/Folio, 2006)
* « La télé fait ce qu'elle sait faire le mieux : elle accomplit le triomphe de la banalisation sur la tragédie, le triomphe de la Surface ».


* « Le plus joli conte de fée de l'enfance, c'est que tout se produit à son heure. [...] L'idée n'atténue guère la monstruosité de l'anéantissement, mais c'est bien l'astuce à laquelle nous avons recours pour sauvegarder l'illusion métronomique et tenir en échec la torture du temps ».
* A propos du passage à l'an 2000 : « Une nuit de bonheur humain pour présenter notre site "barbarie.com". Pour réserver au nouveau millénaire merdo-kitsch un accueil digne de lui. Une nuit regrettable, plus que mémorable ».

Voir aussi
* Le cycle David Kepesh qui comprend trois volumes : Le sein, Professeur de désir et La bête qui meurt (de 1972 à 2006);
* Le cycle Nemesis qui comprend quatre volumes : Un homme, Indignation, Le rabaissement et Nemesis (2006 à 2012);
* Le cycle Nathan Zuckerman qui comprend Zuckerman enchaîné (contenant lui-même L'écrivain des ombres, Zuckerman délivré, La leçon d'anatomie et L'orgie de Praque), La contrevie, Pastorale américaine, J'ai épousé un communiste, La tache et Exit le fantôme ( de 1979 à 2009)

Toutes mes fiches sur Philip Roth
*
Indignation : syndrome du fils unique -- La tache -- La bête qui meurt -
* Roth interview Kundera Philip Roth et Milan Kundera  

* Philip Roth et Milan KunderaL'indignation et Les Faits

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